Priorité tribord amure

"C'est pas l'homme qui prend la mer, c'est la mer qui prend l'homme" Renaud a bien raison. Combien d'imprudents prennent la mer sans connaitre exactement les règles de priorité élémentaires. Un jour, j'ai eu un coup de téléphone d'un ami qui naviguait pour la première fois avec un propriétaire de voilier entre la Sicile et la Sardaigne sur un joli Bénéteau de 40 pieds me demandant ce qu'ils devaient faire face à un bateau de pêche qui tournait en rond. Tres vite, j'ai compris que le propriétaire avait acheté un bateau en faisant confiance à l'électronique. Malheureusement, et ce serait trop beau pour être vrai, les écrans ne remplacent pas les ouvrages de bord utiles aux navigateurs. A connaître par coeur comme les anciens marins. Cà n'a pas changé. Mais, il faut constater que beaucoup de gens partent en mer et ne se rendent pas compte des risques qu'ils engagent pour eux, pour les autres et aussi pour les sauveteurs.

C'est simple. Le navire qui est le moins manoeuvrable est habituellement le navire qui est privilégié ( comme le bateau de pêche qui tourne en rond). Tous les autres bateaux doivent s'écarter de sa route. Et encore plus simple, le plus petit bateau doit laisser passer le plus gros ou s'en écarter. Ce n'est pas tout à fait vrai mais presque. En général, un bateau de plaisance, voilier ou bateau à moteur, n'est pas prioritaire en mer ou les entrées de port face aux bateaux professionnels. Dans l'ordre, un bateau à moteur laisse passer un voilier, un voilier donne la priorité à un bateau en pêche ( deux triangles opposées) , un bateau en pêche n'est pas prioritaire face à un bateau qui est en manoeuvre restreinte ( 1 boule noire + un triangle + 1 boule noire) et ce dernier doit laisser passer un bateau qui n'est pas manoeuvrant ( 2 boules noires). Tout çà n'est pas compliqué quand on navigue souvent. Avant chaque navigation avoir sous la main le texte du règlement international pour prévenir les abordages en mer en particulier les règles de barre et de route. C'est un minimum. Attention, sans faire de leçon de morale.

Faire une erreur de jugement en mer, çà compte pour rien pour un bon navigateur. Il trouvera toujours par son bon sens et son expérience la bonne pratique pour se sortir d'une situation difficile face à un bateau non manoeuvrant. Faut surveiller, se débrouiller, rester calme, se laisser guider par son expérience, agir avec méthode. Après le reste vient tout seul. Il ne mettra jamais les autres en danger.

Lors du premier Vendee Globe, un concurrent s'inscrit dans la course avec Pen Duick. C'est un ancien équipier de Eric Tabarly, JFC qui a réalisé un tour du monde jusqu'au bout en faisant une arrivée triomphale dans le port des Sables d'Olonne. Si mes souvenirs sont exacts, c'était un dimanche pleine marée haute. Le Pen Duick, le 7 eme des 13 concurrents du Vendée Globe, après 163 jours de course, fonça sous spi jusqu'au fond du port. Un vrai régal. Sauf que lors du départ, en novembre 1989, juste après le coup de canon donné par Eric Tabarly, il avait oublié ses cartes de navigations et instructions nautiques dans sa chambre d'hôtel.

Toujours au Vendée Globe, les bateaux vont si vite, que les priorités sont parfois laissées au hasard surtout avec les bateaux de pêche dans le golfe de Gascogne ou devant le port des Sables d'Olonne. Le solitaire est pourtant prudent évitant les zones trop agitées. Il reste des heures à surveiller les parages. Son extrême vigilance est déconcertant. Pourtant, il suffit d'une minute d'inattention et une part de malchance pour percuter un bateau en pêche. Ce dernier avait pourtant la priorité.

Un plaisancier que je connaissais à la Rochelle marquait avec des feutres en couleurs des repères visuels dans son cockpit. Il traçait des lignes et des formes pour se rappeler les principales règles de barre. Colonne de gauche en rouge et colonne de droite en vert. Les feux qu'il va rencontrer sur la route vers l'Ile d'yeu ( phare des baleines), balisage, signaux de détresse. Simple et efficace.

Autre méthode, pour les débutants, il est toujours bien de se faire accompagner d'un gars du coin comme on dit.